Soutenance d’habilitation à diriger des recherches – 15 mars

Chères et chers collègues,
J’ai le plaisir de vous annoncer la soutenance de mon habilitation à diriger des recherches, le* samedi 15 mars 2025 à 13 heures 30*, à l’Université Paris-Est Créteil.

Elle se tiendra devant un jury composé de:
Mme Sylvie Aprile (Université Paris-Nanterre, présidente)
M. Quentin Deluermoz (Université Paris-Cité, rapporteur)
M. Pierre Karila-Cohen (Université Rennes-2, rapporteur)
Mme Judith Lyon-Caen (EHESS, rapportrice)
M. Stéphane Michonneau (Université Paris-Est Créteil, garant)
Mme Maitane Ostolaza (Université Perpignan-Via Domitia)
M. Pedro Rújula (Universidad de Zaragoza).

Le dossier, intitulé *« Royalistes et contrebandiers. Une histoire transnationale et transfrontalière de l’Europe du XIXe siècle »*, est composé comme suit :
– Un mémoire de synthèse sur mon parcours scientifique, intitulé : « Apostille au *Contrebandier et la princesse*. Enquête sur une enquête » ; – Un mémoire inédit : « Le contrebandier et la princesse. Vies et histoires de Ganich de Macaye (1806-2024) » ; – Un recueil de travaux.

La soutenance aura lieu dans la *salle i3-106*, dans le bâtiment I de l’Université Paris-Est Créteil (61 avenue du général de Gaulle, 94000 Créteil; un plan est disponible ici: www.u-pec.fr/medias/fichier/upec-plan-campus-centre_1675871387755-pdf). Elle sera suivie d’un pot auquel vous êtes chaleureusement invité·es. Je remercie celles et ceux d’entre vous qui souhaiteraient assister à cette soutenance de m’en informer avant le 8 mars.
Un *lien de connexion* sera disponible pour suivre la soutenance à distance, sur demande à cette adresse mail avant le 13 mars.
Bien cordialement,
Alexandre Dupont

— *Résumé :*
Ce dossier d’habilitation intitulé « Royalistes et contrebandiers. Une histoire transnationale et transfrontalière de l’Europe du XIXe siècle » propose une histoire politique de l’Europe du XIXe siècle à la fois transnationale et par en bas, centrée sur les mouvements contre-révolutionnaires et sur les acteurs ordinaires de l’internationalisme royaliste.
Au cœur du mémoire inédit, « Le contrebandier et la princesse. Vies et histoires de Ganich de Macaye (1806-2024) », se trouve un épisode apparemment anecdotique de la première guerre carliste (1833-1840) en Espagne : l’opération clandestine qui permet à la princesse de Beira, en exil en Autriche, de rejoindre en Navarre le prétendant don Carlos de Bourbon, qui dirige alors une insurrection royaliste contre le gouvernement libéral. Cette opération clandestine se conclut par la traversée de la frontière franco-espagnole par la princesse, sous la conduite d’un contrebandier basque, Jean Anchordoqui, dit Ganich de Macaye.
Anecdotique et secondaire d’un point de vue événementiel, cet épisode l’est beaucoup moins lorsqu’on l’envisage sous d’autres angles. Il s’agit d’abord d’une opération politique transnationale clandestine qui s’inscrit dans un internationalisme contre-révolutionnaire alors en plein essor. Cette internationale blanche agit dans le secret et la clandestinité, exposée qu’elle est à la répression des gouvernements français et espagnol. Comment agit-on clandestinement dans les années 1830 ? Sur quels acteurs, quels savoirs, quelles stratégies et quelles ressources repose cette clandestinité ? Que révèle-t-elle des capacités de mobilisation et d’organisation des royalistes et des catholiques de la première moitié du XIXe siècle ? En quoi constitue-t-elle un miroir de la construction des États et des systèmes diplomatiques contemporains ? L’enquête examine plus particulièrement ces questions dans l’espace pyrénéen, et plus précisément dans l’espace basque, la frontière franco-espagnole dans cette zone formant une interface entre les carlistes insurgés et leurs partisans européens. C’est là que, par le recours aux contrebandiers et aux passeurs, les carlistes parviennent à communiquer avec l’extérieur et à s’approvisionner. Qui sont ces contrebandiers et ces passeurs ? Que peut-on atteindre de leurs motivations et de leur vision du monde ? Quelle est la place des acteurs populaires dans une mobilisation transnationale à laquelle ils s’avèrent indispensables ? Telles sont quelques-unes des questions que le voyage de la princesse et du contrebandier permet d’aborder.
Mais cette étude des pratiques politiques clandestines des royalistes n’a de sens que si l’on se penche aussi sur les discours qui permettent d’y accéder et de les mettre au jour. Or, cette opération pourtant secrète est au cœur d’une profusion de discours de tous types qui ne se contentent pas de la décrire ou de l’informer : ils la modèlent, l’influencent et la déterminent, et en retour, le passage de la princesse de Beira engendre des récits, des commentaires et des réactions qui ont des répercussions directes sur l’Europe de l’époque, ainsi que sur la signification et la symbolique de l’événement. Cette histoire se trouve dès lors inscrite dans une dialectique entre pratiques et discours qui conduit à la construction de ce couple romanesque : la princesse et le contrebandier. Car l’histoire ne s’arrête pas là : si dans l’Europe légitimiste de l’époque, on célèbre l’héroïsme presque masculin de la princesse, à partir des années 1860 se produit une inversion des représentations sur cet épisode. Au terme d’une mystification littéraire à laquelle il participe et que l’on peut précisément reconstruire, le contrebandier Ganich de Macaye vole la vedette à la princesse de Beira, et devient le héros populaire d’une histoire resignifiée dans une Europe qui se démocratise. C’est le début d’une longue carrière mémorielle pour Ganich, qui se survit à lui-même dans la mémoire collective, et devient l’objet d’une multitude de représentations successives et contradictoires de la basquité, à usage interne mais aussi dirigées vers le monde extérieur. L’histoire de ces représentations, portées par des groupes d’acteurs divers et parfois concurrents, ne peut se faire sans les imbriquer une nouvelle fois avec les pratiques politiques qui se poursuivent autour de la contrebande et du passage. À travers Ganich, ce sont à la fois l’histoire du rapport de nos sociétés à la traversée clandestine des frontières et l’histoire des identités collectives face au temps qui passe que l’on peut retracer jusqu’à nos jours.