AAC / CFP Photographica n° 10 : Bientôt 200 ans ! / Soon to be 200 Years old! (1er décembre 2023)
L’équipe de *Photographica <devisu.inha.fr/photographica/261> *est très heureuse de vous communiquer l’appel à contributions de son numéro 10 : « Bientôt 200 ans ! » (voir ci-dessous et ci-joint pour télécharger le PDF de l’appel en français en anglais).
Pour cet appel, nous attendons dans un premier temps des propositions de deux pages maximum, en français ou en anglais. Elles sont à envoyer au secrétariat d’ici le 1er décembre prochain.
N’hésitez pas à diffuser cet appel autour de vous.
Nous vous remercions par avance de vos contributions.
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Dear colleagues,
The *Photographica <devisu.inha.fr/photographica/261> *team is pleased to share the call for papers for its 10th issue: « Soon to be 200 Years old! » (see below in French and attached for English and French versions).
For this call, we wish to receive two-page propositions first, in French or in English, to be sent to the editorial secretariat by December 1st.
Feel free to share this call.
We thank you in advance for your contributions.
Rose Durr Secrétariat de rédaction de *Photographica* Société française de photographie (SFP) a/s Bibliothèque nationale de France 58 rue de Richelieu 75002 Paris France +33 6 71 96 62 69
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*Appel à propositions*
*Photographica**, n°10*
Numéro à paraître en avril 2025
*Bientôt 200 ans !*
Aujourd’hui, et en l’état de la recherche, la plus ancienne photographie conservée au monde est *Le Point de vue du Gras* de Joseph Nicéphore Niépce. Sa redécouverte en Grande-Bretagne dans les années 1950 par un couple de collectionneurs, Helmut et Alison Gernsheim, a permis de la dater de 1826-1827[1] <#_ftn1>. Aussi est-ce en 2026-2027 que la photographie devrait fêter ses 200 ans. Cet anniversaire ne sera pas celui de sa divulgation publique mais celui de la « première » photographie – la plus ancienne en tous les cas – produite et conservée jusqu’à nous. À cette occasion, et en amont de cet anniversaire, ce dossier de *Photographica *voudrait non pas interroger ses 200 ans d’histoire – un numéro de revue n’y suffirait pas – mais plutôt proposer deux pistes de réflexion aux chercheurs·ses : les questionnements autour des récits des origines et des progrès techniques de la photographie d’une part, le retour sur l’histoire des anniversaires et commémorations photographiques d’autre part. Une troisième et dernière piste de réflexion sera, quant à elle, dévoilée à la fin de cet appel.
*Questionner les récits des origines et des progrès techniques*
Dans son essai de 1931, Walter Benjamin commençait par évoquer les brumes entourant les débuts de la photographie. Celles-ci demeuraient assez épaisses en effet, et d’autant plus qu’elles avaient toujours été le motif de nombreux débats, bien sûr entre Talbot et Daguerre, mais bien plus largement entre les pays et selon les enjeux ou circonstances. Dès le XIXe siècle en réalité, les origines, la nature et le rôle des inventeurs respectifs du médium avait déjà fait l’objet d’enquêtes ou de contre-enquêtes[2] <#_ftn2>. Les recherches de Geoffrey Batchen ont pu montrer qu’il y avait eu près de vingt-quatre prétendants à l’invention, issus de sept pays[3] <#_ftn3>.
Faut-il revenir sur le récit des origines de la photographie ? Qu’y ajouter ? Comment raconter les débuts de l’histoire de la photographie autrement que par ses pionniers ?
« Dans cette version de l’histoire de la photographie, l’Europe est le centre, et le reste du monde devient une simple périphérie. En se concentrant sur les premiers clichés qui ont inévitablement été réalisés par des Européens, une telle histoire nous contraint à reproduire le récit familier de la domination occidentale et de la dépendance coloniale. Mais serait-il possible que cette histoire ne soit pas aussi simple ? Peut-être qu’en y regardant d’un peu plus près, nous pourrions nous apercevoir que la périphérie était déjà là, au centre[4] <#_ftn4> ? »
Si l’on se range à l’avis de Batchen, alors comment repenser le récit des origines de la photographie ? Sous quelle(s) forme(s) ? En effet, lorsque l’on considère les développements actuels des histoires mondiales de la photographie – entendues ici au sens où elles portent sur des régions situées en dehors de l’Europe et des Etats-Unis – ou encore de l’histoire des femmes photographes, on se dit qu’il nous faut sans doute en repenser les cadres. C’est pourquoi les textes de réflexion sur l’histoire des origines seront ici les bienvenus. Comment faudrait-il la raconter et l’enseigner aujourd’hui ?
De même, l’histoire de la photographie a longtemps été racontée comme une histoire internaliste des progrès techniques du médium[5] <#_ftn5>. Si ce type de récit a peu ou prou été abandonné au cours du XXe siècle, et en particulier au cours des années 1930, la question que l’on pourrait se poser aujourd’hui porte sur la manière de considérer ou de *re*considérer cette histoire technique. Car comme l’écrivait déjà François Brunet en 2001 à propos des transformations techniques du XIXe siècle en matière de procédés photographiques, « l’évolution des techniques a donc joué un rôle certain, même si les usages ne se modelèrent pas mécaniquement sur un progrès autonome du photographiable[6] <#_ftn6> ». N’avons-nous pas trop rapidement oublié cette histoire technique ? Comment peut-elle être éclairante sur des enjeux sociaux, économiques ou esthétiques de l’histoire du médium ? L’histoire technique est aussi celle des imaginaires et réactions que ces techniques suscitent. En ce sens, on ajoutera qu’il faudrait aussi considérer les résistances ou tout simplement l’inertie face aux progrès de la photographie, – tels les photographes qui, malgré les évolutions du matériel ou des procédés, conservent leurs techniques anciennes –, mais aussi ceux qui critiquent ou remettent en cause les soi-disant progrès photographiques[7] <#_ftn7>.
*Dates, anniversaires et commémorations*
Contrairement à la peinture, à la sculpture ou au dessin, renvoyés à des origines mythiques, cinéma et photographie possèdent des dates de naissance. Celles-ci sont liées à leurs inventions techniques (multiples), mais aussi à leur première publicité – divulgation publique – ou à leur adoption par le public. L’exposition universelle de 1889 à Paris a été l’occasion de célébrer les cinquante ans de la divulgation publique de la photographie sous la forme d’un banquet. Au XXe siècle, on fêtera en France deux centenaires, en 1925 et en 1939[8] <#_ftn8> ; aux Etats-Unis, celui de 1939. On fêtera aussi plusieurs cent-cinquantenaires : celui de la naissance de Daguerre en 1937, mais surtout celui de 1989 – sans oublier quelques tentatives dans les années 1970 – qui donnera lieu à deux expositions d’importance à Paris,* L’invention d’un regard* au musée d’Orsay et *L’invention d’un art* au Centre Pompidou, mais aussi à l’étranger, si l’on pense par exemple à l’exposition *Silber und Saltz *en Allemagne. Ces manifestations sont symptomatiques des statuts et valeurs accordés au médium.
De ce point de vue, le centenaire de 1925 semble marquer les débuts de la commémoration photographique sous forme d’exposition, et non plus seulement de monument (bustes, statues) et autres lieux de mémoire (plaques commémoratives, etc.). Ceux-ci ne disparaissent pas pour autant : le monument – qui dépasse en dimensions tout ce qui existait jusqu’alors – en l’honneur de Niépce à Saint-Loup de Varenne est quant à lui présenté à l’occasion du centenaire de sa mort, en 1933.
Aussi l’on pourra se demander quelles sont les dynamiques à l’œuvre en matière de commémorations, et notamment à l’étranger, et comment se met en place cette mémoire de la photographie. Ces anniversaires sont-ils anecdotiques ou, au contraire, revêtent-ils un rôle important dans la construction et la reconnaissance de la photographie ? En quoi sont-ils révélateurs des conceptions que chaque époque, chaque lieu, chaque société se fait de la photographie ?
*Et si la photographie n’avait pas existé ?*
Dans la lignée de l’ouvrage de Pierre Bayard *Et si les Beatles n’étaient pas nés *paru en 2022, nous voudrions aussi ouvrir sur les histoires potentielles ou contrefactuelles de la photographie[9] <#_ftn9>. Et si la photographie n’avait pas existé ? Et si tel ou tel photographe n’avait pas été ? Et si elle avait été oubliée[10] <#_ftn10> ou n’avait pas connu le succès ?
D’ailleurs, c’est un peu sous cette forme qu’une partie de l’histoire de la photographie s’est inaugurée. Si l’on veut bien songer par exemple au fait que Niépce présente son invention devant la *Royal Academy *en 1827 mais que celle-ci n’est pas jugée suffisamment aboutie. Et que, de la même façon, et pour des raisons plus politiques ou politiciennes, les positifs directs d’Hippolyte Bayard n’ont pas trouvé officiellement preneurs, ressemblant trop à de vieux dessins. Cela nous permettra de songer à tous les effacés de l’histoire qui, eux, n’ont peut-être même pas laissés de traces ou seulement d’infimes.
Et, si l’on pense à la potentialité que la photographie, comme invention, n’ait pas intéressé les sociétés occidentales des années 1830, quelles en auraient été les conséquences, seraient-elles dystopiques ? Où nous mène cet effort d’imagination ? En même temps, il suffit de considérer le nombre de brevets d’invention déposés par rapport au nombre de machines effectivement développées pour réaliser la proportion de projets restés à l’état d’imagination ou de prototype. Pourquoi nous paraît-il si évident que la photographie existe ?
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*CALENDRIER *
Date limite d’envoi des propositions : *1er décembre 2023*
Les propositions de deux pages maximum sont à envoyer à l’adresse suivante : : redaction@ <redaction@photographica-revue.fr>photographica <redaction@photographica-revue.fr>-revue.fr <redaction@photographica-revue.fr>.
Elles seront anonymisées et évaluées par le comité de rédaction de la revue.
Les auteur·e·s dont les propositions seront retenues en seront avisés *fin décembre 2023*.
Les articles de 30 000 à 35 000 signes (espaces et notes compris) seront à envoyer pour le *1er juin 2024*.
Parution dans la revue *Photographica* (no 10) : *printemps 2025.*
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[1] <#_ftnref1> Helmut Gernsheim, “La première photographie au monde”, *Études photographiques* [Online], 3 | Novembre 1997, Online since 13 November 2002, connection on 30 September 2023. URL: journals.openedition.org/etudesphotographiques/92
[2] <#_ftnref2> Voir par exemple Victor Fouque, *La Vérité sur l’invention de la photographie. Nicéphore Niépce, sa vie, ses essais, ses travaux, d’après sa correspondance et autres documents inédits*, Paris (rue de la Bourse, 10) : libr. des Auteurs et de l’Académie des Bibliophiles ; Chalon-sur-Saône (rue de l’Obélisque) : libr. Ferran, 1867.
[3] <#_ftnref3> Geoffrey Batchen, *Burning with desire: the conception of photography*, Cambridge (Mass.) : the MIT press, 1997. Voir aussi G. Batchen, “Nouvelles origines”, *in* Christine Barthe et Annabelle Lacour (dir.), *Mondes photographiques, histoire des débuts*, Paris / Arles, Musées du Quai Branly-Jacques Chirac, 2023, p. 23-29.
[4] <#_ftnref4> *Ibid*., p. 23.
[5] <#_ftnref5> André Gunthert, “L’inventeur inconnu”, *Études photographiques*, 16 | Mai 2005, Online since 09 September 2008. URL: journals.openedition.org/etudesphotographiques/713
[6] <#_ftnref6> François Brunet, *La naissance de l’idée de photographie*, Paris, PUF, 2012, p. 273.
[7] <#_ftnref7> Au sujet des réactions face à technique, voir François Jarrige, *Face au monstre mécanique. Une histoire des résistances à la technique*, Paris, éditions ihmo, Collection Radicaux libres, 2009.
[8] <#_ftnref8> Voir Eléonore Challine, “La mémoire photographique”, *Études photographiques* [Online], 25 | mai 2010, document 2503, Online since 05 May 2010. URL: journals.openedition.org/etudesphotographiques/3053
Et Challine, *Une histoire contrariée. Le musée de photographie en France* (1839-1945), Paris, Macula 2017, p. 236-264. Voir aussi François Brunet, *La Photographie Histoire et contre-histoire*, Paris, PUF, 2017, p. 157-206. [9] <#_ftnref9> Voir Quentin Deluermoz et Pierre Singaravélou, *Pour une histoire des possibles. Analyses contrefactuelles et futurs non advenus*, Paris, Seuil, 2016.
[10] <#_ftnref10> Voir à ce sujet la nouvelle évoquée par Steve Edwards, *Photography. A very short introduction*, Oxford, Oxford University Press, 2006.